LA NAUSÉE DU «SYSTÈME» VOMIT LA DICTATURE
- angelogeorge988
- 6 mai
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Après le premier tour des élections présidentielles, les Roumains se sont pris un coup de massue sur la tête: une applique avec un couvercle émaillé, rouillé à 40 %, dont les vis sont tordues. Mais la «claque du siècle» ne tombe pas toute seule. Comme dans n'importe quel film d'horreur bon marché produit par la télévision nationale dans les années 1980, le couvercle apporte avec lui une toilette turque remplie de déchets idéologiques. C'est la Fête nationale, car le krach suivra naturellement, après tant d'années de «la vie est belle» avec avec ses guinguettes, sa fête foraine, sa musique orientale et ses prêts à des taux d'intérêt aussi élevés que l'Everest. En Russie, le krach a mis un certain temps avant d'arriver et il a eu besoin d'aide: vodka, goulag, balalaïka et de nouveau vodka. Qu'en est-il de la Roumanie? Les Roumains sont dans une dynamique de «va plus vite que ta ombre», de progression rapide. Le temps de s'effondrer lentement ne leur est pas disponible alors qu'ils sont si «efficaces»! Ils n’auront même pas le temps de chercher des billets d'avion. Même les sites web ne fonctionneront plus. À quoi bon Internet quand les rayons sont dépourvus de produits et que les cartes bancaires sont vides, pire encore que les promesses électorales? Les magasins seront bientôt mis à nu, comme dans les rêves d'austérité. Par la suite, ce sera l'ère du «mon poing dans la ta bouche» et de «dire merci de ne pas vous arracher les chevilles aussi» de la part de la Police Secrète du régime. Le Méchant du village, coupe de cheveux à la papa et vocabulaire emprunté à l'univers carcéral du XIX^e siècle, deviendra président. Les ordres seront criés depuis Cotroceni (l’équivalent roumain du Palais de l'Élysée), et les Roumains danseront comme des marionnettes dont les ficelles sont tirées par un pianiste aveugle.

«Ta gueule» in LA major
Ironie du sort? Ils ont voté pour leur chef d'orchestre. Et maintenant, voici la symphonie finale «Ta gueule in LA major». LA n'est pas Los Angeles, mais le vacarme cacophonique qui suivra, orchestré par les trompettes patriotiques jouant l'hommage du chef en fa mineur au désastre majeur. Le chœur populaire des baiseurs de reliques électorales chantera, avec des larmes de crocodile sur les joues de la patrie, l'hymne du nouveau Messie de la Dâmbovița (le fleuve qui traverse Bucarest, la capitale de la Roumanie). Les crétins (oui, je parle bien des crétins, pas de guillemets, pas d'euphémismes, pas de pardon) qui ont voté pour le distingué M. Simion (celui qui a remporté le premier tour des élections et qui, selon toute vraisemblance, sera le prochain président) seront ravis d'assister à la gravure de son nom sur le squelette ensanglanté de la Roumanie. C'est un tatouage de rouille et de sang, la marque de fabrique du populisme des bidonvilles, ciselé dans la colonne vertébrale d'une nation oubliée par la honte.
La balerine ivre
La Roumanie plonge à nouveau dans les ténèbres, telle une ballerine ivre qui répète depuis trente ans la même chute. Mais cette fois, le gouffre est plus profond. Et les lumières ont été éteintes non pas par accident, mais délibérément, par un Inquisiteur au visage d'influenceur affichant une satisfaction froide. Cette personne, sortie de la fange des frustrations nationales, est poussée par la diaspora qui a confondu le vote avec une séance de thérapie de groupe sur Facebook, ainsi que par des sans-cerveau du pays qui ont pensé «brûlons tout, ça pourrait marcher». Et maintenant, cette personne est en tête d'une course vers nulle part. Les Roumains se sont vengés en votant. Ils pensaient que s'ils en avaient assez du système, ils pourraient vomir un dictateur et se sentir mieux. Peut-être, peut-être pas. Mais le regard de Simion dit tout dans le langage de la barre de métro ou dans le langage de l'épicerie du quartier sans ticket de caisse: «Pas de pitié, pas de quartier». Ce n'est pas une métaphore. C'est la politique de l'État en marche. Son fascisme? Il n'arrive pas en chevauchant des chars d'assaut, mais in «live» sur Facebook et Tiktok. Avec les applaudissements de ceux qui confondent la force avec la verticalité. Qui n'ont jamais ouvert un livre de leur vie, mais connaissent par cœur la playlist de ses discours agressifs. La règle est simple, comme pour les Russes sur le front ukrainien: l'État est tout, l'individu n'est que de la chair à canon. Ou d’une urne. La descente dans le hospice national se poursuit, avec trompettes, accordéon et hourras du public, qui applaudit ses propres fossoyeurs, comme lors d'une première de théâtre absurde où le rideau tombe sur la scène avant que la pièce ne commence. Le deuxième tour sera un mariage grotesque de bêtise et de violence verbale, avec un prêtre politicien et des aboyeurs. Les invités d'honneur? Ceux qui ont confondu l'urne avec une poubelle et le bulletin de vote avec une batte de base-ball. En guise de cadeau, ils apporteront la haine et la volonté d'impuissance joliment enveloppée dans un «essayons celui-là, de toute façon ils sont tous pareils». Non, ils ne sont pas tous pareils. Mais les Roumains ont fait en sorte qu'ils le soient.
La Roumanie ne meurt pas, elle se suicide lentement
La Roumanie se prépare à entrer dans une nouvelle ère, celle de l'âge du cuivre, car le pays n'a pas eu le temps de se développer dans celle de l'or et il ne reste rien de celle du fer. Son futur dirigeant? Un «gros bras» aux allures de sauveur, criant des slogans depuis Facebook et Tiktok, et qui croit que l'économie peut être administrée à coups de publications et que la diplomatie se mène avec des poings sur la table. Et le peuple dans tout ça? Le peuple regarde son écran et écrit des statuts tristes au lieu de construire son avenir. Les larmes numériques couleront, les claviers rougiront d'indignation, mais la réalité restera la même: le silence, la peur et un pays frappé d'amnésie volontaire. S'ils ont eu Ceausescu, les Roumains ont oublié ce qu'est une dictature. Paix à eux: ils la réapprendront. Avec des leçons quotidiennes dispensées par la police secrète et les ordres du Parti. Et la fin? Elle sera poétique. La dernière ampoule s'éteindra dans un studio de province, tandis que la télévision annoncera avec emphase les résultats des élections à venir: «Le peuple a choisi. Rien à ajouter». Les Roumains voulaient du changement? Ils l'auront: la botte dans le cou, le sourire du leader sur tous les panneaux publicitaires, et l'avenir en pointillé. Ils ont voté pour la revanche, ils seront gouvernés par la soif (et la famine!). La Roumanie ne meurt pas, elle se suicide lentement, avec le tampon sur le bulletin de vote et la télécommande à la main.
Le peuple? Quel peuple?
Qu'il soit clair: ce qui suit n'est que la conséquence logique de ce que les Roumains ont demandé. Personne ne leur a forcé la main; on a seulement chatouillé leur ego, enflammé leurs frustrations et livré de la haine par kilogramme ainsi que des illusions par paquet promotionnel. Les Roumains ont mordu, mâché, avalé. La digestion sera longue, douloureuse et irréversible. Si plus de la moitié d'entre eux, ceux qui ont voté, décident qu'ils doivent se résigner, ils le feront. Il en a été de même pour les Américains et les Russes. Personne ne se mettra en travers de leur chemin. Les autres, qui n’ont pas voté ou ont voté pour quelqu’un d’autre, se tairont, partiront ou apprendront à mimer le bonheur sous le portrait du Leader. C'est la volonté de la majorité, disent-ils. Non, c'est simplement l'euphorie collective de l'auto-anéantissement. Comme nous l'avons dit et redit sur ce blog: le peuple n'a pas toujours raison. Quand il est aveuglé par un charisme de pacotille et des slogans récités comme dans le chœur d'une église, le peuple n'est plus qu'une table de manœuvre, avec des applaudissements synchronisés et une pensée à côté de la plaque. Quand le Méchant arrivera au pouvoir, les Roumains ne se demanderont plus «qu'est-ce qui nous arrive?», mais «pourquoi ne sommes-nous pas partis plus tôt?». Le Peuple? Quel peuple? Le peuple silencieux? Celui qui rit aux éclats quand les médias se taisent? Celui qui accuse les penseurs d'être des «traîtres à la Nation»? Non, ce n'est plus le Peuple. Ce n'est plus qu'un troupeau de moutons mené par le fouet métaphorique de la peur et le sucre illusoire de la souveraineté.
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