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PIERRE LE GRAND ET PUTIN LE PETIT

Pour l’Europe de l'Ouest, la chute de l'Union Soviétique a été un événement géopolitique majeur. Pour les pays d’Europe de l’Est, sa désintégration fut un miracle historique, un cadeau des dieux comparable à la disparition de la peste médiévale.


La Russie, un État en lutte permanente contre ses citoyens

La Russie, ce colosse géographique qui s'étend sur la moitié de la planète, a toujours été la championne d'une seule chose: la souffrance de son propre peuple. Un empire bâti sur un mélange toxique d'ambitions messianiques et de mépris souverain pour la vie humaine. Un pays où les dirigeants, qu'ils se soient appelés tsars, secrétaires généraux ou présidents (à vie), ont toujours trouvé le moyen de tourmenter leurs sujets. Alors que d'autres nations mesuraient leurs progrès en termes de richesses, d'inventions et de libertés conquises, la Russie mesurait sa «grandeur» en termes d'hectares de terres annexées et de millions de personnes sacrifiées. De la servitude médiévale aux camps de travail forcé de Sibérie, où le talent littéraire de Soljenitsyne a failli être enseveli sous des couches de glace et de propagande, la Russie n'a jamais manqué de méthodes de torture. Lorsqu'elle n'était pas occupée à affamer à mort ses propres citoyens – voir l'Holodomor en Ukraine – la Russie prenait soin d'exporter ses «bienfaits» vers d'autres peuples. Partout où le char d'assaut soviétique est arrivé, il a apporté avec lui une combinaison mortelle de pauvreté, de peur et de statues hideuses de Lénine et de Staline.

Un pays fasciné par ses propres échecs

Paradoxalement, la Russie reste fascinée par ses propres échecs. Au XXI^e siècle, elle n'a toujours pas d'autoroutes décentes et ses hôpitaux ont des seaux à la place des toilettes. Mais elle continue de construire de nouveaux missiles, de rêver d'empires révolus et de partir en guerre contre l’Occident, même si c'est perdue d'avance. Et toute critique est accueillie par l'éternelle justification: «Oui, mais les Américains/l'OTAN...». Peut-être qu'au lieu de toujours se comparer aux autres, ils devraient regarder de plus près leur propre passé. L'effondrement de l'Union Soviétique est la meilleure chose qui soit arrivée à l'Europe de l'Est au 20ᵉ siècle, et il est arrivé 45 ans trop tard. Malheureusement, car après des décennies de «fraternité entre les peuples» et de communisme, les Russes avaient transformé la moitié de l'Europe en un musée de la pauvreté et de la peur. En 1956, la Hongrie et en 1968, la Tchécoslovaquie ont appris à leurs dépens que la «souveraineté» n'était qu'une sinistre plaisanterie, rapidement corrigée par les chenilles des chars russes. Les murs n'ont pas été construits pour empêcher les «impérialistes» d'entrer, mais pour empêcher leurs propres citoyens de fuir le communisme et le «paradis des travailleurs». Après l'effondrement de l'Union Soviétique, les pays d'Europe de l'Est ont célébré non seulement leur libération de Moscou, mais aussi leur retour à la vie normale. Ils ont alors assailli l'OTAN et l'UE de demandes d'adhésion, renouvelées maintes fois jusqu'à ce que les portes s'ouvrent pour les y laisser entrer. Pendant ce temps, la Russie est restée enlisée dans le ressentiment et la nostalgie impériale, irritée que ses anciennes «colonies» ne veulent plus vivre dans l'obscurité à ses côtés. Après tout, l'effondrement de l'Union Soviétique n'était pas seulement un événement historique, mais aussi une expérience dont les conclusions sont claires: là où il n'y a plus de Russie, la vie prospère. À grande échelle!

Despotisme brutal et obsessions mégalomaniaques

La Russie a un talent unique pour produire des dirigeants qui oscillent entre le despotisme brutal et les obsessions mégalomaniaques. Pierre le Grand en est un cas d'école: un tsar qui a entrepris d'amener la Russie vers la modernité par la force, le sang et la souffrance. Trois siècles plus tard, la Russie a produit son grotesque opposé: Poutine le Petit, un dirigeant qui rêve des empires passés, mais qui est incapable de construire autre chose qu'un régime répressif et une oligarchie corrompue. Pierre regardait l'Occident avec envie et désir d'apprendre. Poutine le regarde avec ressentiment et paranoïa. Pierre le Grand a ouvert des fenêtres sur le monde. Poutine les a refermées et a tiré les rideaux. En fin de compte, Pierre le Grand était un despote qui a fait avancer la Russie, même si c'était sur un chemin pavé de souffrances. Poutine le Petit, en revanche, la fait régresser, nostalgique d'un passé qui ne reviendra jamais.

La puissance sans la prospérité, l'empire sans la stabilité

La Russie semble condamnée à répéter les mêmes erreurs séculaires, quel que soit l'homme au pouvoir. Des tsars à l'autocrate moderne du Kremlin, la Russie a toujours été prisonnière du même paradoxe: elle veut être une grande puissance, mais refuse de créer une société prospère. Son histoire est une longue suite d'expériences politiques catastrophiques, chacune culminant dans la souffrance et l'effondrement du pays. Les tsars ont maintenu le peuple dans la pauvreté et l'ignorance, craignant que l'éducation ne le rende plus difficile à contrôler. Lorsque le tsarisme s'est effondré, les bolcheviques sont arrivés avec des promesses grandioses, seulement pour remplacer l'autocratie des Romanov par une dictature encore plus féroce. Le communisme soviétique a repris la tradition de la répression, mais y a ajouté un contrôle total sur l'esprit et la vie des gens. La Russie post-soviétique, au lieu d'apprendre des erreurs du passé, a repris avec enthousiasme ce qu'elle sait faire de mieux: l'autoritarisme, la censure et l'expansionnisme.

Le paradoxe russe

La Russie est un pays qui possède d'immenses ressources et un vaste territoire. Mais elle est toujours et éternellement à la traîne, économiquement et socialement, par rapport à des pays beaucoup plus petits et plus pauvres en produits de base. La Russie a du gaz et du pétrole, mais pas de routes dignes de ce nom. Elle a un passé glorieux dans les domaines de la science et de la littérature, mais traite ses intellectuels comme des ennemis de l'État. Elle revendique le statut de superpuissance, mais sa population vit dans des conditions plus basses que celles du tiers monde. S'il y a une leçon à tirer de toute cette histoire, c'est que la Russie semble incapable d'échapper à ce cercle vicieux. Chaque dirigeant arrive avec la promesse d'un salut national, pour finalement répéter les erreurs de ses prédécesseurs. Il se peut que la véritable tragédie de la Russie réside dans le fait qu'elle ait toujours été gouvernée par des autocrates et que son peuple se soit tellement habitué à ce joug qu'il ne peut plus concevoir d'alternative.

 

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