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LES GORGES DU KARANGAHAKE : L’OR, LE FANTÔME ET LA FORÊT

C’est un lieu mythique où se sont donnés rendez-vous l'or, les fantômes et le forêt. Située entre Paeroa et Waihi, au cœur de l'île du Nord de la Nouvelle-Zélande, la Réserve historique des Gorges de Karangahake est l'un des secrets les mieux gardés du pays.

Ici, des falaises abruptes plongent dans les eaux agitées de la rivière Ohinemuri, des tunnels miniers fantomatiques résonnent encore des pas du passé et des sentiers ombragés vous mènent à travers les âges et la nature. C'est un endroit où l'histoire est restée intacte, où elle respire tranquillement parmi les fougères, les ponts suspendus et les vestiges rouillés. Un lieu où le temps ne s'arrête pas, mais tourne en rond inlassablement.

En voiture, direction les gorges du Karangahake!

Le voyage commence sur la State Highway 2 (SH2), une route qui serpente à travers la campagne vallonnée et les collines. Les gorges de Karangahake se trouvent à moins de deux heures d'Auckland (vers le sud), à une heure de Tauranga (vers l’ouest) ou de Hamilton (vers l’est), dans la région de Waikato, près de la frontière avec la Baie de Plenty. Il s'agit d'une zone montagneuse spectaculaire, où la rivière Ohinemuri serpente à travers des falaises et des forêts denses, dessinant un paysage magnifique. L'endroit est célèbre pour ses sentiers de randonnée, ses tunnels creusés dans la roche, les vestiges d'anciennes mines d'or et le silence profond de la forêt.

Le train

Goldfields Railway propose un charmant voyage en train sur une section restaurée de l'ancienne ligne de chemin de fer entre Waihi et Karangahake, construite à l'origine pour transporter l'or lors de l'apogée de l'exploitation minière. Aujourd'hui, le train ne transporte plus de minerai, mais des histoires liées à l'endroit, aux gens et au passé. C'est une expérience touristique idéale pour les familles, les passionnés d'histoire et tous ceux qui souhaitent découvrir la beauté rurale et l'aura mystérieuse de la région à un rythme tranquille. La fumée des locomotives et le bruit des rails ajoutent la touche glamour de cette époque révolue, et le voyage devient un pont entre le présent et le passé.

L'itinéraire et les gares

Le train part de la gare de Waihi et arrive, après une demi-heure de trajet comme un rêve, à la gare de Waikino, où se trouve un café très apprécié des voyageurs et des habitants de la région. Ce voyage court mais mémorable me rappelle les trajets similaires en Roumanie dans les montagnes «Apuseni». Il longe la rivière Ohinemuri, traverse une zone rurale tranquille, de vieux ponts et des sites historiques d'extraction de l'or. Le train circule généralement du vendredi au dimanche, ainsi que certains jours fériés. Les départs de Waihi ont lieu entre 10 h et 14 h, toutes les 1 à 2 heures, et les retours de Waikino durent environ 30 à 40 minutes. Les tarifs sont abordables: 20 dollars néo-zélandais (aller-retour) pour les adultes, 10 dollars pour les enfants et 45 dollars pour une famille (2 adultes + 2 enfants). Les vélos peuvent être transportés pour une somme modique. Ce voyage est plus qu'un simple trajet en train: c'est un retour dans le passé, une leçon d'histoire vivante, et il ravit donc les visiteurs de tous âges.

Voici ma recommandation

Pour découvrir toute la magie de la région, partez de Waihi à bord du train touristique Goldfields Railway pour un voyage pittoresque jusqu'à la gare de Waikino. De là, il ne vous reste que 5 à 10 minutes de marche jusqu'à l'entrée du sentier de randonnée emblématique Karangahake Gorge Walkway. En le suivant, vous pouvez peuvent explorer les spectaculaires gorges de Karangahake, les tunnels miniers mystérieux et les sentiers en bord de rivière jalonnés de cascades cachées. Vous pourriez également découvrir le complexe historique de Victoria Battery, avec ses murs et ses reliques qui racontent l'histoire de la ruée vers l'or. Après cette journée d'exploration, vous retournerez à Waikino pour prendre le train en direction de Waihi. Ce sera une journée parfaite pour tous les âges, qui comblera les amateurs d'aventure, les passionnés d'histoire industrielle et les amateurs de glamour avec un voyage en train d'époque.

L'âme vivante des Gorges de Karangahake

La rivière Ohinemuri prend sa source dans les montagnes près de Waihi, puis serpente patiemment à travers les Gorges de Karangahake, où elle rejoint la rivière Waihou près de Paeroa. Longue d'environ 28 kilomètres, elle est bien plus qu'un simple cours d'eau: c'est une présence, un chemin sacré, une mémoire qui n'oublie jamais. Dans la culture Māori, «Ohinemuri» se traduit approximativement par «lieu de la dernière fille» ou «héritage de la fille oubliée».

Ce nom trouve son origine dans une légende Ngāti Hako selon laquelle une jeune femme de haut rang n'a pas été choisie pour se marier et a été «laissée derrière». La rivière est ainsi devenue le porteuse de son nom et de son histoire. Pour les tribus Ngāti Hako, Ngāti Tara Tokanui et Ngāti Maru, la rivière est un awa tapu, c'est-à-dire une rivière sacrée, chargée de mauri (force vitale) et de mana (autorité spirituelle).

C'est un espace vivant et respirant entre les forêts, les tunnels et les anciennes ruines d'or. Cette rivière a été tour à tour source de vie, de mythe, de richesse et de destruction. Puis, avec l'oubli, est venue la guérison. Tandis qu'elle coule entre les rochers et les fougères, les histoires de ceux qui l'ont touchée se succèdent: des mineurs avides d'or, des guerriers et des tohunga, des enfants aux pieds nus, des routards et des voyageurs, ainsi que des ancêtres dont les noms flottent encore dans l'air, portés par les vents depuis les quais. Ohinemuri n'est pas seulement de l'eau, mais aussi une voix.

Histoire de l'or

Entre 1875 et 1952, la rivière Ohinemuri a été le cœur de la région: l'épicentre d'une fièvre de l'or qui a transformé les gorges en site industriel. Ses eaux étaient utilisées pour laver le minerai, refroidir les machines et alimenter d'énormes installations telles que Victoria Battery, qui fut l'un des plus grands moulins industriels de Nouvelle-Zélande. Mais cette activité a eu un prix élevé. Des substances toxiques telles que le mercure et le cyanure ont été utilisées dans le processus d'extraction de l'or, entraînant une pollution grave de l'eau de la rivière et un endommagement des écosystèmes locaux.

Restauration écologique

Après la fermeture des mines, la nature a peu à peu repris ses droits. Des décennies de restauration écologique ont suivi et, aujourd'hui, l'Ohinemuri coule à nouveau, par endroits suffisamment propre pour que l'on puisse y voir des poissons indigènes se faufiler entre les pierres. C'est une rivière qui a connu la cupidité et la guérison, la colère et le pardon, une rivière qui porte dans ses ondulations les leçons d'une époque qui a brillé puis s'est éteinte.

L'écosystème d'Ohinemuri

Au cœur des gorges de Karangahake, la rivière Ohinemuri serpente entre des falaises abruptes et des ponts suspendus. Elle nous offre un spectacle enchanteur porté par des forêts luxuriantes de fougères punga, de kākāua et de tawa, créant une véritable symphonie verte qui embrase l'eau cristalline. Des sentiers enchanteurs, comme le Windows Walk ou le Rail Tunnel Loop, longent attentivement le cours de la rivière, avec des vues spectaculaires, un son apaisant des cascades et des recoins cachés, parfaits pour un pique-nique ou un moment de réflexion en pleine nature. Sur les eaux d'Ohinemuri, des oiseaux aquatiques rares volent et se perchent: les pūtangitangi, canards sauvages au plumage vivement coloré, le kotare, un curieux martin-pêcheur aux ailes bleues scintillantes, et le gracieux héron à face blanche au vol élégant. Dans le silence des berges se cachent des espèces endémiques de poissons, d'insectes et d'invertébrés, un petit monde fragile et précieux qui contribue à l'équilibre de ce paradis naturel. La végétation riveraine, autrefois menacée, renaît aujourd'hui grâce au travail minutieux des bénévoles et aux projets locaux de restauration écologique, redonnant vie et espoir à un écosystème vivant qui palpite en harmonie avec l'esprit du lieu.

Karangahake Gorge Parking

Il est spacieux et bien organisé, et offre suffisamment de places pour accueillir les nombreux visiteurs qui s'y rendent même les jours de grande affluence. Les visiteurs peuvent consulter la carte détaillée située à l'entrée du sentier pour planifier leur visite. Au-dessus de la rivière Ohinemuri, le célèbre pont suspendu scintille avec grâce, invitant les voyageurs à s'engager sur le sentier qui mène à la Gorge.

Au cœur des Gorges

Dès que vous vous engagez sur le sentier, le bruit des voitures s'estompe pour laisser place au chant des oiseaux et au grondement de l'eau. L'itinéraire circulaire du tunnel ferroviaire, très apprécié des familles, serpente à travers un sous-bois dense. Il vous plongera ensuite dans la fraîcheur sombre d'un tunnel souterrain de 1,1 km. Je vous conseille d'emporter une lampe de poche ou de laisser vos yeux s'habituer progressivement à la faible lumière qui vous guide vers l'avant, en guise de rappel. Une fois que vous en serez sortis, vous traverserez les vieux ponts métalliques suspendus au-dessus de surplombs émeraude, les mêmes ponts sur lesquels circulaient autrefois les trains chargés d'or.

He Wāhi Tapu, un lieu sacré

Bien avant que les mineurs ne laissent leur empreinte, Karangahake était déjà un lieu d'une grande importance pour les tribus locales, un endroit chargé de sens spirituel et écologique. Ce nom est souvent traduit par «l'appel de Hake», un ancêtre vénéré. Il évoque l'image de voix ancestrales portées par le vent à travers la gorge, un écho du passé qui résonne encore à travers les rochers. Les collines environnantes conservent encore les traces des pā-uri (fortifications traditionnelles), des points d'orientation sacrés et des lieux de collecte de nourriture. Tous sont aujourd'hui cachés sous le manteau vert de la végétation, mais n'ont jamais été oubliés. En parcourant ces sentiers, vous suivrez les traces de ceux qui ne cherchaient pas l'or, mais le rongoā, des plantes médicinales, le silence et une communion profonde avec la nature. Si vous écoutez attentivement, vous percevrez la dignité silencieuse de ce lieu. Celui-ci n'est pas seulement un paysage, mais un taonga, un trésor vivant soigneusement transmis de génération en génération.

The Window Walk

Le Chemin des fenestres (the Window Walk) est l'endroit le plus poétique des Gorges. C'est l'itinéraire que je préfère sous la voûte des falaises. Si vous n’avez que le temps d'une seule promenade, laissez vos pas vous guider le long de ce chemin enchanté. Ce parcours d'environ une heure apaise l'âme et s'adresse à tous ceux qui souhaitent ressentir le mystère des lieux. Il doit son nom au tunnel creusé profondément dans le mur du quai, où des «fenêtres» s'ouvrent à la lumière du jour, offrant des vues inattendues. Le tunnel conserve une ombre mystérieuse, donc vous aurez besoin d’une torche ou de la lumière de votre téléphone portable pour progresser doucement dans l'obscurité. Le chemin qui mène à cette aventure commence par le premier pont suspendu, qui relie les rives du fleuve situées sur le parking. Puis, sur la gauche, un second pont vous invite à vous engager dans l'aventure qui vous attend.

Ruines dans la forêt

Le sentier monte doucement en pente jusqu'à une colline d'où vous pourrez apercevoir un chemin de traverse, une invitation à la découverte. Je vous recommande de le suivre, car vous découvrirez alors des vestiges fascinants d'anciennes exploitations minières. Autrefois imposant édifice, ces ruines étaient une citadelle du travail humain. Aujourd'hui, la nature a repris ses droits et les murs en ruine semblent renfermer des mystères cachés. Telles des pyramides mayas oubliées dans la jungle, bien que beaucoup plus modestes, elles n'en demeurent pas moins pleines de mystère.

La ruée vers l'or

La ruée vers l'or de la fin du XIXème siècle a irréversiblement modifié le paysage de ces lieux. Des tunnels profonds ont été creusés dans les collines et des substances telles que le mercure et le cyanure se sont infiltrées dans les eaux des rivières. Pourtant, les vestiges de cette époque continuent d'impressionner: des fondations recouvertes de mousse, des lignes de tramway effondrées, ainsi que l'imposant squelette de l'ancienne usine Victoria Works, autrefois l'usine de traitement d'or la plus ambitieuse de l'hémisphère sud. Aujourd'hui, la nature reprend lentement ses droits. Les racines de nos arbres s'enroulent autour des pierres cassées, les fougères se penchent sur les chariots rouillés et la terre guérit, silencieusement et continuellement.

L’entrée dans le tunnel

En grimpant au-delà des ruines industrielles, vous pouvez vous engager sur l'ancienne voie ferrée qui vous mènera au cœur de «The Window Walk». Là se trouve un vieux wagon qui transportait autrefois le minerai dans les galeries obscures. Il est silencieux et rouillé. Étonnamment, ses roues sont encore en parfait état de marche. Au début, il semblait prisonnier du temps, mais sur le chemin du retour, une famille le poussait joyeusement, les enfants riant à l'intérieur, comme dans un jeu d'un autre âge. Un pur moment de joie, baigné dans les ombres de l'histoire.

Te Ara o ngā Tipuna – la Voie des Ancêtres

Les pistes vous emmènent dans un royaume à part, où la pierre a été fendue non seulement par le fer de l'homme, mais aussi par la volonté vivante de la Terre. Le tunnel grimpe silencieusement le long de la falaise et, tout en haut de la paroi rocheuse, la vue s'ouvre largement sur les gorges sacrées. À l'intérieur, l'obscurité vous enveloppe, mais des fenêtres taillées par la main du mineur s'en dégagent. Ces ouvertures semblent avoir été taillées par Tūmatauenga, le dieu de l'acier et de la guerre. Autrefois, on jetait des scories dans les eaux de la rivière Ohinemuri par leur intermédiaire, au mépris de ceux qui avaient oublié le tapu, le caractère sacré de la nature. Mais le temps a passé et la rivière a guéri. Aujourd'hui, les fenêtres ne crachent plus de débris, mais ouvrent les yeux sur le monde: les yeux du rocher qui regardent en silence, la bouche de la montagne. Celle-ci parle de lumière et, peut-être, si vous écoutez vraiment, de la voix d'un ancêtre qui murmure: «Ko wai koe? — Qui es-tu?».

Des chemins modernes, pas anciens

Karangahake est bien plus qu’un musée de pierre et de rouille. C'est un lieu vivant, avec des tui et des kerū, des pigeons endémiques qui volent sans entrave au-dessus de nos têtes, avec le parfum agréable du mānuka, et des sentiers qui invitent les visiteurs, qu'ils soient marcheurs ou cyclistes. Un détour par les chutes d'eau d'Owharoa permet d'admirer un rideau d'eau parfait se déversant en cascade dans une piscine naturelle. Le café de la gare ferroviaire de Waikino, au bout de la route historique, propose un café fort, des muffins chauds et une incursion agréable dans le patrimoine ferroviaire de la région. Vous pouvez opter pour une courte promenade suivie d'un pique-nique au bord de la rivière, ou passer des heures à explorer des sentiers plus longs tels que le Crown Track, ou même faire une randonnée jusqu'au Waitawheta Hut pour une expérience complète de la nature sauvage.

Pensée à la fin!

Les Gorges de Karangahake sont bien plus qu’une simple promenade dans la nature ou une leçon d'histoire vivante. Elles sont un dialogue silencieux et profond entre les époques et les dimensions du temps, un pont invisible qui relie un passé troublé à un présent plein d'espoir. Sous la voûte verte de la forêt, les chuchotements des tūpuna résonnent, et chaque pas du visiteur résonne de l'écho des souvenirs, des chagrins, mais aussi d'un renouveau ininterrompu. Karangahake ne crie pas, n'exige pas d'attention bruyante, mais invite tranquillement, avec une force douce et une dignité ancestrale. Si vous avez la patience d'écouter vraiment, vous plongerez dans une histoire qui va bien au-delà de l'éclat de l'or. C’est une histoire de racines profondes, du courage de ceux qui ont labouré des chemins de pierre, de la renaissance de la nature à partir des blessures causées par l'homme, et du lien sacré qui unit l'homme à la terre.

Karangahake est une invitation à se reconnecter avec son âme, à marcher avec respect sur les traces de ses ancêtres et à avancer, sage et épanoui. Cette porte ouverte sur le passé vous mènera vers un avenir où le respect de la nature et la mémoire collective brilleront autant que l'or caché dans les profondeurs de la terre. Alors, quand vous partirez d'ici, emportez avec vous les souvenirs, mais aussi le vœu de faire vivre l'histoire de ce lieu, d'en transmettre les mystères et d'y laisser votre empreinte, à pas comptés et à cœur ouvert. Karangahake est bien plus qu’un lieu sur la carte, c'est une légende vivante qui attend d'être vécue, ressentie et aimée.

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